Paru dans le Solidaire 16 mars 2005
«Comment trouver un bon boulot une fois les études finies?», se demandent beaucoup de jeunes. Des milliers d'entre eux marchent dans les rues de Bruxelles ce 19 mars à l'appel des sections jeunes des syndicats et de mouvements de jeunes dont Comac. Mais que font nos gouvernements en Belgique et en Europe pour aider les jeunes à trouver une réponse à cette question? Faits et analyse...
Aris Oikonomou
16-03-2005
Le chômage des jeunes a augmenté de 7,5% ces cinq dernières années. Parmi les moins de 24 ans, un jeune sur quatre est sans emploi. (Photo Solidaire, Salim Helalet) - Cliquez sur la photo pour l'agrandir - Deviens membre d'un syndicatLe débat et la lutte pour l'emploi doit pouvoir se mener le plus largement possible et continuer après le 19 mars. Pour y arriver, n'hésite pas à adhérer aux sections locales de ton syndicat. Plus d'infos:£ |
Le 24 et le 25 Mars aura lieu à Bruxelles un Sommet pour évaluer et approfondir la stratégie de Lisbonne, la référence pour la Stratégie Européenne de l'Emploi (SEE), que les dirigeants de l'Union Européenne (UE) ont décidé de suivre en 2000. Cette stratégie stipule que jusqu'à 2010 l'UE doit «devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale »1. Cinq ans après et à quelques jours de ce Sommet d'évaluation, quel en est le bilan pour la jeunesse? Très mauvais, si l'on se réfère aux données d'Eurostat, bureau des statistiques de la Commission Européenne.
Moins d'emplois...
Ainsi, depuis 1999, en Belgique, il y a eu une hausse de 7,5% du taux de chômage pour les jeunes entre 15 et 24 ans qui sont sur le marché du travail2. Celui-ci atteignait un jeune sur quatre de cette tranche d'âge en 2004. Pour les filles de cette même tranche d'âge, le taux de chômage est encore plus élevé : 27%. Ces pourcentages dépassent largement le taux de chômage national de 8,0% (janvier 2005) et la moyenne européenne, déjà très élevée, de chômage des jeunes de moins de 25 ans (18,7%)3.
...et des emplois de moins bonne qualité
De plus, les jeunes qui ont la «chance» de ne pas être au chômage sont davantage recrutés dans des jobs «hamburgers» (contrat à temps partiel et/ou à durée déterminé ; travail intérimaire, etc.) Ces types d'emplois offrent peu ou aucune stabilité et sécurité, des bas salaires et une faible couverture légale et syndicale (par rapport au salarié à temps plein et à durée indéterminée). Ainsi pour près d'un jeune salarié sur cinq entre 18 et 24 ans, le temps partiel est une réalité et pour 35,6% c'est le travail sous contrat à durée déterminée. Selon une enquête de la Fondation Travail-Université à Namur (FTU-CRTT)4 la majorité (53,2%) des jeunes étaient déjà en 2001 dans cette situation plus par contrainte que par choix. Selon Patricia Vendramin, chercheuse, ceci montre que ces formes «atypiques» d'emplois sont une des seules options pour éviter ou sortir du chômage et pour entrer dans la vie professionnelle. Et les statistiques sont très claires : cela touche tous les jeunes5, indépendamment de leur niveau de formation/éducation.
Emploi ou profit?
Lisbonne prétend garantir l'amélioration de l'emploi et la croissance du profit. Les faits démontrent que la combinaison est impossible. C'est l'un ou l'autre.
Les gouvernements européens ont choisi. En 1993, dans le «Livre blanc sur la croissance, la compétitivité et l'emploi» il est question de la réduction du chômage à travers « [] des grands sacrifices de la part des travailleurs (via, par exemple, le gel des salaires, le travail à temps partiel, ) de sorte qu'ils soient employables [] »6 mais aussi via des cadeaux (fiscaux) aux patrons. Quelques années plus tard au Luxembourg (1998), la Commission lança les concepts d'employabilité et de flexibilité, en disant qu'il faut toujours être plus employable (attirant pour l'employeur) et plus flexible (adaptable aux nécessités du marché) pour garder son emploi. On veut, ainsi, faire porter aux chômeurs la responsabilité de leur situation puisqu'ils n'en font pas assez pour se rendre attirants. Finalement nous arrivons au 21ème siècle et aux sommets de Lisbonne, Stockholm et Barcelone. La politique «d'emploi» prend une nouvelle ampleur, les spécialistes de la Commission proposent, entre autres : la privatisation des services publics (enseignement, transports, soins de santé etc.), la «chasse aux chômeurs», l'augmentation du nombre de personnes âgées au travail...
Aujourd'hui nous avons les preuves que toutes les mesures de nos gouvernements sont en fait des mesures pour le profit mais en aucun cas des mesures qui permettent la création d'emplois. Pourtant, ce sont ces recettes que la Commission Européenne et nos gouvernements tentent de continuer à nous vendre
1Conclusions de la Présidence, Conseil Européen de Lisbonne 23 et 24 Mars 2000 http://ue.eu.int · 2 Cela veut dire qu'on ne tient pas compte des jeunes qui sont aux études dans ces statistiques · 3Eurostat : Euro-indicateurs, communiqué de presse 32/2005, Janvier 2005 : Le chômage dans la zone euro stable à 8,8% , 4 mars 2005 · PDF de cinq pages 4 VENDRAMIN, P., Le travail atypique : Résultats d'enquête, Fondation Travail-Université : Centre de Recherche de Travail et Technologie, Namur, 2001 · 5 En 2001 des jeunes travaillant à temps partiel subi , 28,5% avaient terminé des études post-secondaire/universitaire, 37% sup. technique ou général ou professionnel et 16% primaire. Ibidem. · 6 Stefanou-Nikolakopoulou I., L'Europe Sociale : déficits et perspectives, Sideris, Athènes, 2002, p.81
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