Lors des élections étudiantes en Grèce, j’ai eu l’opportunité de parler avec plusieurs militants de la PKS (front syndical étudiant), de la KNE et du KKE à propos de l’importance de s’organiser en tant que force communiste dans les facultés de participer aux élections étudiantes et de relever le défi que ces élections représentent. L’entretien qui suit a été effectué dans à Thessalonique le jour même des élections avec Isabela P., membre et responsable de la PKS, de la KNE et du KKE.
Pourquoi participez-vous aux élections en tant que force politique ? Pourquoi est-ce important de s’organiser en tant que force politique et syndicale dans le supérieur ?
Je commencerais par répondre à ta deuxième question. Il est central, sinon impératif, que les étudiants soient organisés dans leurs facultés. Sans une organisation forte et de masse, qui soit dans la première file de la lutte pour résoudre les problèmes des étudiants des familles populaires, le supérieur serait rapidement tombé à la merci des entreprises et de leurs serviteurs : le PASOK, la Nouvelle Démocratie et l’Union Européenne.
Il faut une organisation qui informe les étudiants de toutes les réformes et changements et qui démasquent les plans de privatisation de notre enseignement. Il est aussi central de s’organiser et revendiquer l’enseignement et les structures que nous trouvons justes pour nous. L’enseignement qui répond à nos besoins.
Le fait de rester passifs profite aux plans d’apprivoisement de la jeunesse. Nous ne pouvons pas les laisser faire.
La Pansoudastiki Kinisi Sinergasias (PKS) est une organisation qui veut être dans la première file de cette lutte. Non seulement par l’action et l’organisation, mais aussi avec nos propositions, nos interprétations des causes des problèmes et des solutions proposées par les divers partis bourgeois. Nous trouvons aussi important de faire constamment le lien avec les travailleurs et leurs revendications, surtout les revendications du mouvement syndical de classe et le PAME (Front syndical du KKE)
Concernant les élections, il est capital d'y participer. Non seulement parce que cela permet d'évaluer nos efforts politiques durant l’année et l’évolution ou non de notre travail, mais principalement parce que c’est via les élections que nous pouvons participer dans les organes représentatifs. En ayant un groupe dans les organes de représentation qui a les objectifs dont je viens je vous parler, nous pouvons vraiment faire bouger les choses.
Les enjeux cette année sont encore plus importants à cause de deux événements : premièrement, à cause du mouvement massif contre la révision de l’article 16 et la loi cadre. Deuxièmement, le vote favorable à la loi-cadre et son application des l’année prochaine dans les diverses facultés.
Il faut que ce mouvement puisse se refléter dans les organes de représentation. Il faut que la voix du refus des reformes libérales et pour un vrai enseignement public fasse reculer les forces qui veulent ces réformes (la DAP et la PASP) au sein des structures représentatives. Il faut aussi que toute tentative d’application de la loi-cadre par les autorités facultaires rencontrent une opposition féroce de la part des représentants étudiants dans les divers conseils d’administration.
La PKS doit devenir cette force qui fera basculer la balance dans les organes représentatifs et les organes de « cogestion » vers le mouvement étudiant et empêchera l’application de n’importe quelle loi réactionnaire.
Par ailleurs, la participation de la PKS dans les structures représentatives au niveau facultaire et universitaire est centrale pour que celles–ci puissent dépasser leur seule fonction de service, de « lobby ». Il faut que ces organes deviennent vraiment politiques et qu’ils offrent des vraies perspectives. A savoir, aller au-delà de l’aspect superficiel des problèmes et qu’ils poussent à participer à la vie sociale et politique du pays. Nos organes doivent lutter contre les vues qui veulent une université neutre et stérilisée.
Par rapport à la situation actuelle, certains disent –notamment l'EAAK (les gauchistes) et les anarchistes-, que le mouvement est mort avec la fin des occupations. Est-ce également l'avis de la PKS ?
Le fait que les occupations aient pris fin n'indique pas du tout que le mouvement est mort. Le mouvement ne s’arrête jamais. Un mouvement passe nécessairement par des phases ascendantes, pour ensuite diminuer d'intensité. Mais nous ne pensons pas que ce soit le cas actuellement.. Nous constatons par nos discussions avec les étudiants que nous ne sommes plus au sommet du mouvement comme lors des semaines précédentes et que ceux-ci ne sont pas prêts à fermer les facultés. Cependant, la réponse sur la suite du mouvement doit être discutée dans et donnée par les organes de représentation et non par la PKS seulement.
En tant que PKS, nous affirmons que nous devons continuer les Assemblées Générales avec participation massive jusqu’à la fin du semestre en juin et dès septembre. Il ne faut pas oublier que la discussion sur l’Article 16 a été postposée et que de nombreuses réformes doivent encore suivre (notamment sur les Masters et la recherche).
Il faut aussi souligner qu'une mauvaise identification a été faite entre mouvement/lutte et occupation. Il faut donner les outils aux étudiants pour dépasser ce malentendu, il faut organiser des activités polymorphes au niveau de la section et de la faculté. Il faut donner l’opportunité aux gens de comprendre qu’il est possible d’avoir un mouvement de 1001 façons et que le mouvement trouve toujours de nouvelles manières de s'exprimer en prenant de l'ampleur. C’est ce que la lutte de ces dernières semaines nous a montré.
Selon certains, le mouvement mûrit, évolue. Il passe des manifestations aux occupations et à la consolidation politique. Est-ce que tu es d’accord avec ça ?
Mise à part l’expérience personnelle que chaque étudiant acquiert dans son engagement dans le mouvement, il y a aussi la l’expérience collective. Étant donné le statut éphémère des étudiants, ce dernier aspect n’est peut-être pas clair. Cependant, cette expérience collective a laissé une empreinte profonde dans la structure du mouvement. Ainsi, mise à part le mûrissement personnel que nous constatons chez une grande partie des étudiants du fait qu’ils condamnent les nouvelles mesures, nous constatons aussi un mûrissement dans notre organisation. Nous sommes aujourd’hui plus mûrs non seulement pour répondre aux problèmes des étudiants, mais aussi pour aider les étudiants à approfondir leur critère de mise en question des réformes. Cela constitue un acquis, même si demain nous –les étudiants qui ont participé dans cette lutte- partons d’ici .
Donc, on peut dire que ce mouvement aura des conséquences dans les élections étudiantes ?
Bien sûr. Il serait impossible que ce mouvement qui dure depuis un an n’ait pas de répercussions sur les élections. Nous avons vu cela depuis la phase préélectorale. Celle-ci a été une des seules fois où nous avons abordé des questions véritablement politiques et où les échanges ont été faits sur base de nos propositions politiques sur l’enseignement supérieur. Si l'on compare avec les campagnes précédentes, nous sommes de facto à un échelon supérieur.
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